Directives pour les modalités de sédation consciente, sédation profonde ou d’anesthésie générale
Compte tenu de l’état actuel des connaissances et des enjeux relatifs à l’accessibilité des soins, l’Ordre des dentistes du Québec, mû par sa mission de protection du public, a élaboré ces directives afin de proposer aux dentistes québécois des éléments d’information structurés susceptibles de les appuyer dans la poursuite de leurs objectifs thérapeutiques.
Ces directives se veulent générales dans leur application en ce que le choix des agents sédatifs ou des techniques utilisées repose sur des protocoles et des normes établis qui sont maîtrisés par le praticien dûment formé, des contraintes imposées par le patient ou la procédure et la probabilité d’induire une perte de conscience non- intentionnelle.
La responsabilité professionnelle demeure entière. Nous nous permettons aussi de rappeler l’ensemble des obligations déontologiques auxquels tous sont soumis.
Ces directives seront revues périodiquement pour assurer leur validité.
Les administrateurs de l’Ordre des dentistes du Québec remercient chaleureusement les docteurs Kenneth Bentley, Patrick Canonne, Norman Pierre Edger, David Kozloff et Paul-Richard Trépanier pour leur expertise et leur précieuse collaboration.
Ils remercient aussi tous ceux et celles qui ont commenté les versions préliminaires.
1. Définitions
1.1 La sédation consciente
La sédation consciente est un état de conscience minimalement déprimé qui permet au patient de conserver le contrôle de ses voies aériennes et de répondre convenablement à une stimulation physique et à un ordre verbal. Il est produit par une méthode pharmacologique ou non pharmacologique ou par une combinaison des deux.
En dentisterie, la sédation consciente est utilisée pour permettre l’exécution de traitements dentaires en minimisant le traumatisme physiologique et psychologique, améliorant ainsi le confort du patient. Les techniques de sédation consciente doivent être exécutées de façon telle que la perte de conscience soit évitée, c’est-à-dire que le patient puisse contrôler la perméabilité de ses voies aériennes et répondre convenablement à une stimulation physique et à un ordre verbal.
La sédation consciente peut être réalisée pharmacologiquement par une des modalités suivantes :
- l’inhalation d’oxygène et de protoxyde d’azote;
- l’administration d’un seul agent sédatif ou d’une combinaison d’agents sédatifs par voie orale;
- la combinaison de l’inhalation de protoxyde d’azote/oxygène avec un(des) agent(s) sédatif(s) par voie orale;
- l’administration d’un(des) médicament(s) par voie parentérale (intraveineuse, intramusculaire);
- l’administration d’un médicament par voie rectale.
1.2 La sédation profonde
La sédation profonde est un état contrôlé de conscience déprimée, accompagné de la perte partielle de réflexes protecteurs, incluant l’inaptitude du patient à contrôler ses voies aériennes et l’inhabileté à répondre convenablement à une stimulation physique et à un ordre verbal.
1.3 L’anesthésie générale
L’anesthésie générale est un état contrôlé d’inconscience accompagné de la perte complète ou partielle de réflexes protecteurs, incluant l’inhabileté de contrôler ses voies respiratoires ou de répondre spontanément à une stimulation physique ou un ordre verbal. Les termes «sédation profonde» et «anesthésie générale» s’appliquent à toute technique qui déprime l’état de conscience du patient au- delà de celui de la sédation consciente et incluent la neuroleptanalgésie et l’anesthésie dissociative.
2. Principes généraux
2.1 Toutes les modalités
Les principes suivants s’appliquent à toutes les modalités de sédation ou d’anesthésie générale lorsqu’ils sont utilisés par des dentistes.
-
Un dentiste doit avoir réussi un programme de formation reconnu et conçu, selon les modes d’application décrits à la section 3, pour atteindre les compétences requises en regard de l’administration de techniques de sédation consciente, de sédation profonde et d’anesthésie générale.
- L’environnement de pratique doit assurer la présence suffisante de personnel. L’armamentarium nécessaire aux procédures effectuées doit être disponible sur place et conforme aux standards de l’Association canadienne de normalisation (CSA). Les équipements (voir annexe I [PDF-142K] ) seront entretenus de façon à assurer leur fonctionnement sécuritaire et conforme aux normes d’origine du manufacturier et d’installation.
- Les histoires médicale et dentaire pertinentes doivent être clairement documentées et annotées. Seront inclus: la description des maladies présentes et passées, les hospitalisations, les médicaments actuels et leur dose et l’histoire des allergies (particulièrement aux médicaments). Une enquête fonctionnelle et un examen physique approprié doivent être complétés pour chaque patient préalablement à l’administration de toute forme de sédation consciente ou d’anesthésie générale. Le statut physique du patient devrait être déterminé selon la classification de l’American Society of Anesthesiologists (ASA). Toutes formes de sédation consciente et d’anesthésie générale devraient être limitées aux patients de statut ASA-I ou ASA-II.
- Seul un dentiste ayant réussi un programme de formation reconnu ou un médecin dûment licencié au Québec, une infirmière licenciée au Québec agissant sous la supervision et le contrôle direct d’un médecin ou un inhalothérapeute agissant sous la supervision et le contrôle direct d’un médecin, peut administrer un sédatif ou un agent d’anesthésie générale.
- Le dentiste et son personnel doivent être prêts à reconnaître et à traiter toute réponse inadéquate aux médicaments administrés. Ils doivent utiliser les méthodes et les équipements d’urgence appropriés et s’assurer de maintenir leur compétence en regard de leur emploi. Le dentiste et tout le personnel clinique doivent détenir une certification actualisée en réanimation cardiopulmonaire et être en mesure d’effectuer les techniques de base de réanimation cardio-pulmonaire. Le dentiste doit établir les protocoles pertinents des procédures d’urgence. Il doit en informer son personnel et revoir avec lui ces protocoles sur une base régulière.
2.2 La sédation consciente
- La réussite d’un programme de formation reconnu par l’ODQ et conçu pour atteindre un niveau de compétence requis pour un mode précis de sédation consciente est obligatoire. Un tel programme peut être offert par les facultés dentaires ou dans le cadre d’un programme d’éducation continue. Il sera :
- organisé et enseigné par des dentistes reconnus par l’ODQ comme possédant les compétences pour administrer l’anesthésie générale et la sédation consciente appliquées à la dentisterie. Ils seront appuyés, au besoin, par d’autres professionnels reconnus en regard des techniques enseignées;
- convenu que cet enseignement se dispense dans un environnement adéquat qui permet au candidat d’appliquer les techniques enseignées sur des patients, lors de traitements dentaires;
- obligatoire qu’une évaluation écrite du candidat témoigne du niveau de compétence atteint en regard d’un mode spécifique d’administration de sédation consciente.
- Les instructions préopératoires et postopératoires doivent être données par écrit au patient ou à un adulte responsable l’accompagnant lors de la visite préalable au traitement.
- Si un dentiste administre une sédation consciente parentérale et agit concurremment en tant qu’opérateur, il doit être assisté du personnel requis (voir la section 4).
- Le consentement écrit du patient ou de l’adulte responsable l’accompagnant doit être obtenu préalablement à l’administration de la sédation consciente.
- Lors de toute intervention sur un patient dont la conscience est altérée, la présence d’une troisième personne (ex. : assistante) est requise.
- Le dentiste responsable de l’administration de la sédation consciente ne doit jamais laisser son patient sans surveillance.
- Le professionnel qui administre la technique sédative doit évaluer l’état physique du patient avant de signer son congé et ne doit, en aucun temps, quitter les lieux avant que le patient soit en état de partir.
- À l’exception du protoxyde d’azote et de l’oxygène employés seuls, toutes les techniques de sédation consciente requièrent que le patient, à son congé, soit confié à un adulte responsable. Le patient doit être averti de ne pas conduire de véhicule, de ne pas opérer une machinerie hasardeuse, de ne pas prendre d’importantes décisions ou d’éviter la consommation d’alcool durant une période minimale de 18 heures, ou plus si une somnolence ou un vertige persiste.
3. Principes spécifiques
3.1 L’administration orale d’un agent sédatif unique
Un médicament peut être employé pour induire la sédation consciente. Il sera préférablement administré au cabinet dentaire. Le niveau de conscience du patient doit être contrôlé par l’observation clinique et l’évaluation de ses signes vitaux.
Lorsqu’il obtient son congé, le patient doit être confié à un adulte responsable. Le dentiste doit détenir une certification en réanimation cardio-pulmonaire.
3.2 L’utilisation du protoxyde d’azote avec ou sans agent(s) sédatif(s) oral (aux) et l’utilisation de multiples agents sédatifs oraux
Le protoxyde d’azote utilisé seul ou en combinaison avec un (des) agent(s) sédatif(s) oral(aux) peut être administré par :
- un dentiste qualifié ayant complété une formation spécialisée en sédation consciente (voie parentérale) en milieu universitaire ou hospitalier;
- un spécialiste en chirurgie buccale et maxillo-faciale détenant une formation adéquate en sédation et en anesthésie générale;
- un dentiste ayant complété avec succès une formation spécifique à cette modalité de sédation.
Cette formation spécifique satisfera les exigences suivantes :
Exigences théoriques : 20 heures de cours données par un dentiste dûment formé pour la sédation et l’anesthésie appliquées à la dentisterie ou par un médecin dûment formé en anesthésie.
Exigences cliniques : participation active, supervisée et appliquée de ces modalités dans le traitement d’au moins 10 patients, et l’équivalent de deux semaines de rotation au département d’anesthésie d’un hôpital universitaire avec une participation active dans l’administration de l’anesthésie générale incluant la ponction veineuse, l’intubation endo-trachéale et le maintien des voies respiratoires, ou la réussite d’une formation avancée en réanimation cardio-pulmonaire (Advanced Cardiac Life Support : ACLS) ou son équivalent.
Dans les trois cas énoncés plus haut, le dentiste devra détenir une certification en réanimation cardio-pulmonaire valide.
3.3 La sédation consciente parentérale
L’utilisation de la sédation consciente parentérale avec un (des) agent(s) sédatif (s) peut être exécutée par :
- un spécialiste en chirurgie buccale et maxillo-faciale détenant une formation spécifique pour l’administration de la sédation consciente et l’anesthésie générale; ou
- un dentiste qui a réussi une formation spécialisée en sédation et en anesthésie générale en milieu universitaire ou hospitalier. Un tel cours doit être approuvé par l’ODQ et être dispensé par une institution d’éducation accréditée. Il comportera des pré requis cliniques et théoriques suivants :
Exigences théoriques
• La formation comprendra un minimum de 12 mois d’étude spécialisée en milieu universitaire ou hospitalier.
Exigences pratiques
• La formation pratique comprendra l’administration supervisée de techniques de sédation consciente parentérale concomitante avec un traitement dentaire et une formation en anesthésie générale.
• La réussite d’un cours avancé de réanimation cardio-pulmonaire (ACLS) ou son équivalent est recommandée.
3.4 La sédation profonde et l’anesthésie générale
- Tous les cabinets privés de dentiste qui offrent des services de sédation profonde ou d’anesthésie générale doivent être immatriculés auprès de l’ODQ. Un tel permis sera accordé par l’Ordre s’il est démontré que la formation du personnel est adéquate et que la conformité avec cette politique est constatée de façon satisfaisante. Le permis accordé est valide pour une période de trois ans.
- La sédation profonde ou l’anesthésie générale ne doivent être administrées qu’à des patients de statut ASA-I ou ASAII (selon la classification de l’American Society of Anesthesiologists (ASA)), par un professionnel qualifié selon les principes suivants :
- un dentiste qui détient un certificat de spécialiste en chirurgie maxillo-faciale de l’ODQ dont la formation comprend un entraînement spécifique en sédation et en anesthésie générale faisant l’objet d’évaluations spécifiques en cours de programme;
- un dentiste qui a réussi un programme postgradué en sédation profonde et anesthésie générale dans une université et/ou hôpital d’enseignement;
- un médecin licencié du Québec compétent à administrer la sédation profonde ou l’anesthésie générale.
- Un dentiste ne peut administrer une sédation profonde ou une anesthésie générale et être l’opérateur en même temps.
- Les instructions préopératoires et postopératoires doivent être données par écrit au patient ou à l’adulte responsable l’accompagnant lors de la visite préalable.
- Le consentement écrit du patient ou de l’adulte responsable doit être obtenu antérieurement à l’administration de sédation profonde ou anesthésie générale.
- Lors de toute intervention sur un patient dont la conscience est altérée, la présence d’une troisième personne (ex : assistante) est requise.
- Le patient ne doit jamais être laissé sans surveillance par le dentiste responsable de l’administration de la sédation profonde ou anesthésie générale.
- Le professionnel qui a administré la technique sédative doit évaluer l’état physique du patient avant de signer son congé et ne doit en aucun temps quitter les lieux avant que le patient soit en état de partir.
- Les techniques de sédation profonde et d’anesthésie générale requièrent que le patient soit confié à un adulte responsable lors de son congé.
4. Les équipes
4.1 L’équipe de sédation consciente (voie orale et voie parentérale)
L’administration du protoxyde d’azote employé seul ou en combinaison avec un (des) agent(s) sédatif(s) par voie orale, et la sédation consciente parentérale administrée à des patients dentaires ambulatoires doivent être effectuées par une équipe de sédation consciente. L’équipe de sédation consciente comprendra les personnes suivantes:
- LE DENTISTE, dûment qualifié, responsable de l’équipe de sédation consciente et de la procédure dentaire et détenant une certification en réanimation cardio- pulmonaire.
- L’ASSISTANT, sous la supervision et responsabilité du dentiste, s’assure que le champ opératoire est libre de sang, de mucus et de débris. La procédure opératoire terminée, il surveille le patient lors de l’éveil (émergence). Cette personne doit détenir une certification en réanimation cardio-pulmonaire. Une troisième personne peut aussi agir comme responsable du réveil. On ne peut exécuter les deux tâches (assistance et responsable réveil) simultanément lorsque plus d’un patient sont en processus de traitement.
- LE SOUTIEN ADMINISTRATIF effectue les tâches cléricales de sorte que l’équipe de sédation consciente ne soit pas distraite.
4.2 L’équipe de sédation profonde et anesthésie générale
L’anesthésie générale ou la sédation profonde pour des patients dentaires ambulatoires doit être administrée par les efforts combinés d’une équipe d’anesthésie générale. L’équipe d’anesthésie générale sera constituée des individus suivants:
- LE DENTISTE responsable de la procédure dentaire et détenant une certification en réanimation cardio-pulmonaire.
- LE MÉDECIN-ANESTHÉSISTE OU LE DENTISTE DÛMENT QUALIFIÉ, détenant une formation post doctorale comportant une formation spécifique pour administrer et gérer les modalités de sédation profonde et d’anesthésie générale. Ce dentiste devra également détenir une certification ACLS (Advanced Cardiac Life Support) ou son équivalent.
- L’INHALOTHÉRAPEUTE détenant un permis valide pour pratiquer au Québec. L’inhalothérapeute agit sous la direction du médecin. La présence de l’inhalothérapeute est facultative.
- L’ASSISTANT, sous la supervision et responsabilité du dentiste, s’assure que le champ opératoire est libre de sang, de mucus et de débris. La procédure opératoire terminée, il surveille le patient lors de l’éveil (émergence). Cette personne doit détenir une certification en réanimation cardio-pulmonaire. Une troisième personne peut aussi agir comme responsable du réveil. On ne peut exécuter les deux tâches (assistance et responsable réveil) simultanément lorsque plus d’un patient sont en processus de traitement.
- LE SOUTIEN ADMINISTRATIF effectue les tâches cléricales de sorte que l’équipe d’anesthésie générale ne soit pas distraite.
Note:
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Émission : Mai 2000
Révision : en cours